Étoiles, qui d’en haut voyez valser les mondes,
Faites pleuvoir sur moi, de vos paupières blondes,
Vos pleurs de diamant ;
Lune, lis de la nuit, fleur du divin parterre,
Verse-moi tes rayons, ô blanche solitaire,
Du fond du firmament !
Oeil ouvert sans repos au milieu de l’espace,
Perce, soleil puissant, ce nuage qui passe !
Que je te voie encor ;
Aigles, vous qui fouettez le ciel à grands coups d’ailes,
Griffons au vol de feu, rapides hirondelles,
Prêtez-moi votre essor !
Vents, qui prenez aux fleurs leurs âmes parfumées
Et les aveux d’amour aux bouches bien-aimées ;
Air sauvage des monts,
Encor tout imprégné des senteurs du mélèze ;
Brise de l’Océan où l’on respire à l’aise,
Emplissez mes poumons !
Avril, pour m’y coucher, m’a fait un tapis d’herbe ;
Le lilas sur mon front s’épanouit en gerbe,
Nous sommes au printemps.
Prenez-moi dans vos bras, doux rêves du poète,
Entre vos seins polis posez ma pauvre tête
Et bercez-moi longtemps.
Loin de moi, cauchemars, spectres des nuits ! Les roses,
Les femmes, les chansons, toutes les belles choses
Et tous les beaux amours,
Voilà ce qu’il me faut. Salut, ô muse antique,
Muse au frais laurier vert, à la blanche tunique,
Plus jeune tous les jours !
Brune aux yeux de lotus, blonde à paupière noire,
Ô Grecque de Milet, sur l’escabeau d’ivoire
Pose tes beaux pieds nus ;
Que d’un nectar vermeil la coupe se couronne !
Je bois à ta beauté d’abord, blanche Théone,
Puis aux dieux inconnus.
Ta gorge est plus lascive et plus souple que l’onde ;
Le lait n’est pas si pur et la pomme est moins ronde.
Allons, un beau baiser !
Hâtons-nous, hâtons-nous ! Notre vie, ô Théone,
Est un cheval ailé que le Temps éperonne,
Hâtons-nous d’en user.
Chantons Io, Péan !… Mais quelle est cette femme
Si pâle sous son voile ? Ah ! c’est toi, vieille infâme !
Je vois ton crâne ras ;
Je vois tes grands yeux creux, prostituée immonde,
Courtisane éternelle environnant le monde
Avec tes maigres bras !
La Comédie de la Mort,